1948: La terra trema (La terre tremble)
Les femmes attendent le retour des pêcheurs perdus dans la
tempête
Ce recueil de textes est extrait du Dossier de presse de la filmographie
viscontienne, paru dans la revue Cinéma 76, numéro
211.
" Un film naît dans un cadre de culture plus
général. Si je voulais m'emparer du thème méridional.
je ne pourrais prendre comme point de départ que le plus haut niveau
artistique atteint dans l'expression d'un tel sujet: c'est-à-dire
Verga."
Luchino Visconti
Visconti a le mérite d'intégrer
dialectiquement les acquisitions du cinéma italien récent
à une esthétique plus large, plus élaborée
où le terme même de réalisme n'a plus grand sens. Nous
ne disons pas que la Terre tremble est supérieur à
Paisa
ou à Chasse tragique, mais seulement qu'il a du moins
le mérite de les dépasser historiquement.
(André Bazin. Esprit. Repris dans "Qu'est-ce
que le cinéma?", Tome IV)
Dans les deux films sur le Risorgimento
et dans
la Terre tremble, Visconti a donné trois points
de vue concernant l'échec de la révolution et la continuation
de l'ordre ancien. Dans la Terre tremble il prend le point
de vue des pêcheurs exploités et ses explications sont franchement
économiques et politiques. Les pêcheurs, parce qu'ils n'ont
jamais l'organisation politique et le pouvoir économique ne peuvent
se débarrasser de leur oppression; et comme ils ne sont pas maîtres
des moyens de production, c'est-à-dire d'une amélioration
de leur situation, ils ne comprennent pas le besoin d'une action collective
et d'une organisation. Ils échouent mais Visconti et avec eux de
tout coeur dans leur défaite.
(Geoffroy Nowell-smith. La Revue du Cinéma,
n°237)
Réécrire Verga à
la lumière de Marx; c'est essentiellement ce qu'a fait Visconti.
(Geoffroy Nowell-smith. La Revue du Cinéma,
n°237)
L'esthétique anthropomorphique
se définit par l'unité de l'homme et du monde, de la culture
et de la nature et aucun film n'en représente mieux la pleine réalisation
que la Terra trema.
(Yves Guillaume. Visconti)
La Terra trema se situe au
carrefour de l'esthétisme le plus concerté, le plus raffiné
et de l'interprétation la plus libre, la plus spontanée:
au carrefour d'Eisenstein et du cinéma-vérité.
(Pierre Billard. L'avant-scène n°32-33)
La Terre tremble se présente
comme la plus libre et la plus "sacrilège" des uvres du nouveau
cinéma italien. Toutes les lois du cinéma traditionnel sont
mises en pièces. Visconti se fait une règle d'observer sans
aucun plan les faits et les personnages, pour qu'ils se recomposent ensuite,
en un ordre nouveau, dans le coeur de chaque spectateur, grâce au
seul fil conducteur d'une participation humaine.
(Carlo Lizzani. Le cinéma italien)
Visconti voulait donc montrer la
route malaisée et révolutionnaire d'un cinéma engagé,
d'un cinéma provocateur et dérangeur, et perpétuer
justement dans l'art, dans la société de l'après-guerre,
l'héritage moral de la Résistance.
(Giuseppe Ferrera. Visconti)
L'exigence viscontienne de garder
intacte la langue maternelle des habitants d'Aci Trezza va bien au-delà
d'une vielle polémique littéraire. C'est avant tout une sorte
de revendication contre le purisme réactionnaire qui tenait pour
funeste un cinéma entaché d'expressions dialectales, et c'est
donc une victoire de la langue des humbles, de ceux qu'on n'écoute
jamais, qui s'exprimèrent finalement sans censure, sans traductions
postiche.
(Giuseppe Ferrera. Visconti)
La photo, souvent statique,
parfois très sombre, est belle et composée avec un art extrème.
Cette liberté qu'il se refusait sur le plan du dialogue et du récit,
Visconti se l'est accordée dans le domaine de la plastique. Il avait
avec lui un brillant cameraman, G.R. . Aldo, et 1a Terra trema
est un des sommets de la photographie mondiale.
(R. Borde et A. Bouissy. Le néo-réalisme
italien)"
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